La culture de l’évaluation est une démarche récente (décret n°98-1048 du 18 novembre 1998 relatif à l’évaluation des politiques publiques) ayant pour objet d’apprécier l’efficacité de cette politique en comparant ses résultats aux objectifs assignés et aux moyens mis en œuvre.
Les dispositifs se développent bien de plus en plus au sein de la sphère publique et auprès des administrations commanditaires toujours référées aux logiques du contrôle, de l’inspection ou de l’audit : ainsi les appels d’offres et appels à projets, dans un contexte de gestion accrue, prennent-ils le pas vers une culture de l’évaluation, de son éthique et de ses méthodes.
Une évaluation est couramment définie comme un jugement de valeur partagé sur une politique publique. La littérature s'accorde en effet à identifier trois composantes à une évaluation : un processus qui vise à délimiter et obtenir des informations sur la valeur d'une action ; un produit qui est le jugement de valeur et un usage de ce produit pour modifier l'action par des décisions. L'évaluation de programme est un processus de production d'un jugement de valeur pour conduire une action par des décisions.
Dans le secteur de la formation, l'évaluation est utilisée depuis quelques années à la fin des programmes de formation continue. Ils sont régulièrement associés à des bilans. Très peu utilisée dans la sphère "formation initiale", j'ai testé l'évaluation d'un programme de formation supérieure avec des jeunes achevant leur troisième année d'une Ecole de Commerce. J'avoue que cette démarche a étonné à la fois les étudiants et elle a également bousculé les pratiques internes !
Les résultats d'une évaluation en formation ne sont pas forcément utilisés comme des indicateurs pour améliorer les processus pédagogiques. Les opérateurs les utilisent car il s'agit d'une exigence de la part des commanditaires ou des financeurs. Pourtant aux Etats-Unis, les pratiques d'évaluation appelées "assessment" dans le secteur de l'éducation ne sont pas récentes. Elles se développent depuis le XIXe, pour mesurer d'abord l'efficacité des étudiants puis du système éducatif. Et quand on expérimente l'évaluation en formation, on ne revient jamais en arrière...
Les 18 et 19 juin, la Société Française d'Evaluation (association référente en Evaluation) a organisé deux journées d'études et de conférences sur l'évaluation. Les thèmes étaient variés et conçus pour répondre aux préoccupations de chacun.
- Un parcours décideur s’adresse aux élus, directeurs généraux, directeurs. Les thèmes abordés le sont sous un angle stratégique et politique.-
- Un parcours initiation permet à toute personne en quête de connaissances sur l’évaluation des politiques publiques, ou désireuse d’acquérir une compétence en la matière, de participer activement aux débats mais
aussi aux temps de réflexion collective.
- Un parcours praticien a pour objectif de répondre aux besoins de montée en compétences de la communauté des évaluateurs. Des formations leur sont ainsi proposées ainsi que des séquences sous d’autres formats.
Praticienne de l'évaluation, et tentée pour en savoir plus sur les tendances à venir dans l'évaluation, je me suis orientée vers des ateliers tels que "l'évaluation et la prospective" et l'évaluation participative.
Compte tenu de ma culture "formation" et "numérique", je partage avec vous mes observations sur l'évolution des pratiques d'évaluation.
Quand vous évoluez au sein de la SFE vous observez que l'évaluation reste une discipline de la sphère publique. La sphère privée représentée sur le salon et à travers les séminaires est constituée principalement par des cabinets conseil spécialisés ou non dans l'évaluation. Adhérente depuis près d'une année au sein de la SFE, je suis souvent vue comme une prestataire et une praticienne au service de la sphère publique. Peut-être que les choses évolueront pour intégrer également la sphère privée comme un acteur à part entière...
Les objets évalués et étudiés restent des programmes ou des actions de politiques publiques. Certaines tendances font apparaître que les objets de l'évaluation évolueront car les thèmes évalués évoluent dans leur définition et dans leur format. Prenons l'exemple du territoire, sujet complexe faisant l'objet de nombreuses évaluations en politique publique, il est aujourd'hui considéré comme un système (ce sont les acteurs qui font le territoire). Un des exercices les plus difficiles dans un processus d'évaluation est d'identifier ce qui doit être évalué et par qui.. Et dans le cas présent, le territoire comme système implique donc de bien identifier l'ensemble des parties prenantes agissant au sein du territoire. A mon niveau,, une première tendance observée sera en lien avec les objets qui deviendront de plus en plus complexes à déterminer. Identifier les parties prenantes deviendra donc également un exercice nouveau...
Pour poursuivre sur l'exercice de l'évaluation, les méthodologies et les process évoluent trés rapidement et portent aujourd'hui de plus en plus sur le participatif. Qu'est ce ce que cela signifie ?
La SFE a développe plusieurs séminaires à ce sujet et je vous invite à consulter ces ressources si vous souhaitez faire évoluer vos pratiques dans ce domaine. (Ressources disponibles ici)
L'évaluation participative associe tous les participants à la définition commune des enjeux, problèmes et questions sur lesquels se basera ensuite l’analyse, la validation de la méthodologie, puis l’interprétation des données (B. Perret, 1998). Le degré de participation est bien entendu dépendant des budgets affectés aux dispositifs d'évaluation...
Si je devais faire un parallèle avec la sphère de l'expertise internationale, qui développe également l'évaluation des programmes de coopération et le domaine de la formation professionnelle, il existe aujourd'hui des mouvements appelés "Constructivisme" (une bonne évaluation doit intégrer une grande diversité de points de vue, et non ceux des seuls évaluateur et commanditaire) qui influent sur les process et les méthodologies notamment dans le domaine de la formation. La coopération internationale en tant que secteur d'activité économique et la formation évolueront de plus en plus en associant l'ensemble des parties prenantes dans la construction et le développement des projets, qu'il soient dans le domaine de la coopération ou de l'éducation et de la formation.
Une autre tendance observée est celle du suivi de l'évaluation et celui de l'appropriation. Des praticiens notamment la sphère privée prestataire dans les dispositifs d'évaluation, observent depuis peu le développement d'une nouvelle démarche post-Evaluation menée par quelques collectivités territoriales. Des conclusions et des recommandations ont été validées à la fin des dispositifs d'évaluation et font l'objet (encore timidement) d'un suivi soit en interne soit par des prestataires.
Ces dispositifs peuvent prendre la figure de nouvelles évaluations sur la mise en place de nouvelles actions, soit sur d'une évaluation, à mon sens sur des formats plus courts appelés aujourd'hui "rapides et efficaces". Ne pas confondre avec des techniques appelées "Rapid Assessment" qui sont généralement utilisées dans des contextes internationaux humanitaires et d'urgences. Seulement les méthodologies transposées dans un nouveau contexte influenceront certainement le marché de l'évaluation.
Enfin, le marché de l'évaluation évoluera également dans son format car les commanditaires développent de nouvelles compétences et l'acculturation à l'évaluation nécessite beaucoup de pédagogies. Certains cabinets évoluent dans leur prestation en travaillant avec le commanditaire pour permettre l'appropriation des données, tout en participant à un dispositif d'évaluation.
Le marché de l'évaluation est un marché concurrentiel évolutif de services où l'évaluation sera associée à de nouveaux services comme par exemple l'exploitation des données issues de l'évaluation à travers l'utilisation d'outils numériques. A suivre...
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